Au moment où il reçoit en 2022 le Prix Evidence de l'Académie du Jazz (récompensant un album-pépite à découvrir), le guitariste suisse Louis Matute est un quasi-inconnu en France. Ce qui avait alors séduit les critiques sourcilleux de l'institution, c'était la fraîcheur des interprétations et la nouveauté du propos tant la musique de son Large Ensemble (le nom de son groupe nous met en partie sur la voie...) réalisait une synthèse naturelle entre ses lointaines racines honduriennes, les folklores imaginaires qu'il créait dans ses compositions, son net tropisme brésilien, sans oublier la pulsation et les improvisations propres à la culture jazz. Teintée de pop et de saudade, euphorisante et douce-amère, la musique de Louis Matute ne ressemble qu’à lui. C'était, à vrai dire, réaliser à sa façon une prophétie non écrite du jazz, en foi de quoi ce grand mouvement artistique du XXe siècle trouverait son prolongement et son évolution plongé dans le bain des musiques du monde. Composé de fortes individualités, soudé par une désormais longue complicité avec ses partenaires, le Large Ensemble de Louis Matute continue de tracer son chemin buissonnier, invitant le public à un voyage rétif aux étiquettes... si ce n'est qu'une musique comme la sienne n'a pas de prix !
- Léon Phal (saxophone ténor) Louis Matute (guitare électrique) Zacharie Ksyk (trompette) Andrew Audiger (piano, piano électrique) Virgile Rosselet (contrebasse) Nathan Vandenbulcke (batterie)
- louismatute.com
Avec sa belle gueule mi-ange, mi-rebelle qui pourrait rappeler aux amateurs de jazz celle de Chet Baker dans sa prime jeunesse, Chris Isaak part gagnant au concours des guitaristes / chanteurs photogéniques. Heureusement de tels charmes, dont les clips ont joué docilement dans les années 80 et suivantes (y compris en compagnie de Lætitia Casta), ne suffisent pas à construire une star au long cours. Sa voix constitue sans doute son meilleur atout : elle combine la douceur du crooner et une certaine sophistication qui n'est pas sans rappeler dans ses inflexions frôleuses celle de Bryan Ferry, autre dandy du rock. Ses sources musicales ne font pourtant pas nécessairement dans le feutré : il y a dans son jeu et dans les sons qu'il affectionne le rock californien des années 70, l'esthétique Nashville teintée de country, sans parler du R&B et de quelques allusions explicites au rockabilly. Bien sûr nous avons eu droit à ses grands classiques (Wicked Game, Blue Hotel, Baby did a bad bad thing…) mais aussi plusieurs œuvres immortalisées par Elvis Presley, Johnny Cash et Roy Orbison. Malgré tout, Chris Isaak, porté par un jeu de guitare aux phrases et aux accords d'une parfaite lisibilité, reste un romantique, excellant dans les ballades ou les medium tempo. Il incarne donc à sa manière sensuelle et parfois tourmentée une sorte de rêve hollywoodien égaré entre deux siècles, ourlé de nostalgie, cool rock en bandoulière...